Impression Objectif Zero-Sale-Con
 

OBJECTIF ZERO-SALE-CON

Robert Sutton, professeur de management à la Stanford Engineering School, vient de publier un livre qui commence à faire du bruit dans le monde de l'entreprise. Le titre en est provocateur « Objectif Zéro-Sale-Con ». Et le sous-titre encore plus : « Petit guide de survie face aux connards, despotes, harceleurs, trous du cul et autres personnes nuisibles qui sévissent au travail »… Mais il faut parfois de la provocation pour remuer des entreprises où certaines pratiques difficilement avouables continuent à perdurer…
Si tous les managers ne sont pas des sales cons, c'est une maladie qui guette tout manager…


Qu'est-ce qu'un « sale con » ?

Qui n'a pas eu dans son entourage, professionnel, familial ou dans son voisinage un de ces individus odieux, parfois brillants, mais toujours pénibles à supporter ? C'est le « beauf » qui la « ramène » tout le temps, le voisin ou le collègue impossible, le chef tyrannique. Et nous avons vite fait de les estampiller du titre de sales cons. Mais parfois, d'autres personnes nous sont antipathiques et nous irritent. Elles aussi ont droit, un peu rapidement, au titre peu glorieux de sales cons.
Il est donc nécessaire de faire la différence entre les véritables sales cons et les personnes avec lesquelles nous ne nous entendons pas, mais qui n'ont rien fait pour nous nuire. Par ailleurs, certains sales cons savent bien se cacher.
Pour rendre ce repérage plus objectif, Robert Sutton définit le sale con selon douze « vacheries » que ces individus prennent plaisir à infliger à leurs victimes (p. 9) :
•  Lancer des insultes personnelles
•  Envahir l'espace personnel d'autrui
•  Imposer des contacts physiques importuns
•  Proférer des menaces et pratiquer des formes d'intimidation verbales et non verbales
•  Dissimuler sous des plaisanteries sarcastiques et des soit-disant « taquineries » des propos vexatoires
•  Envoyer des emails cinglants
•  Critiquer le statut social ou professionnel
•  Humilier par des remontrances publiques
•  Couper grossièrement la parole
•  Porter des attaques hypocrites
•  Jeter des regards mauvais
•  Traiter les gens comme s'ils étaient invisibles.

Cela ne veut pas dire que pour gagner le titre de sale con, il faille utiliser toutes ces techniques. Un véritable sale con attaque ses « cibles » avec au moins une de ces vacheries.

Et pour compléter le diagnostic, deux critères permettent d'évaluer si une personne a un comportement de sale con (page 8) :
•  Après avoir parlé à cette personne, la « cible » se sent-elle agressée, humiliée, démoralisée ou rabaissée ? En particulier, la cible se sent-elle encore plus nulle ?
•  La personne en question s'attaque-t-elle aux « petits », de préférence à ceux qui sont plus puissants qu'elle ? 

Voilà de quoi les repérer de loin.

•  Sale con occasionnel et sale con certifié

Roberte Sutton, fait très justement remarquer qu'on a tous à un moment ou à un autre un comportement de sale con. Mais il y a ceux qui sont toujours (ou presque) des sales cons. Ces derniers sont les pires et il leur donne le titre de « sales cons certifiés ». Les autres étant des « sales cons occasionnels ».

Qui est touché par ce syndrome ?

Dans l'introduction du livre, après une étude approfondie sur la prédominance de l'influence de l'environnement ou de la personnalité dans les phénomènes de harcèlement, Hervé Laroche conclut que « c'est peut être difficile à reconnaître, mais la matière première pour fabriquer les sales cons peut être n'importe qui ou presque  » et il ajoute : « voilà d'où sort notre sale con : de la rencontre de l'individu ordinaire et de l'organisation ordinaire . Pas besoin, pour cela, d'enfer économique ou de perversion psychologique. Pas moyen, par conséquent de condamner le système ou d'invoquer des traumatismes psychologiques. La responsabilité, elle est ici, maintenant, en chacun de nous. »
Tout le monde peut donc être touché par cette maladie. Des circonstances ou un environnement cumulés à des traits de caractère favorables et un individu « normal » peut se transformer en véritable sale con certifié.
Prudence donc…

Le coût total du sale con

Pour inciter les entreprises à réagir et à engager une opération « Objectif zéro-sale-con », Robert Sutton propose un chiffrage de ce que coûtent à l'entreprise les sales cons qui sévissent en son sein.
Il définit un nouvel indicateur qui pourrait se trouver dans le nouveau tableau de bord de tout dirigeant qui se respecte : le CTSC ou coût total de sale con…
Qu'y a-t-il dans cet indicateur ? Robert Sutton donne une liste (non exhaustive, mais déjà bien longue) des facteurs à prendre en compte.


•  Dommages aux victimes et aux témoins

•  Détournement des efforts : davantage d'efforts sont faits pour éviter les mauvaises rencontres, y survivre, éviter les reproches et moins d'efforts dans l'exécution des tâches.
•  Détérioration de la « sécurité psychologique » et instauration d'un climat de peur qui réduit les initiatives des employés, leur envie de prendre des risques et leurs possibilités de progresser à partir de leurs propres erreurs et de celles des autres – la franchise peut ne pas être la meilleure politique.
•  Perte de motivation et d'énergie.
•  Détérioration de la santé mentale et physique due au stress.
•  Possible détérioration des capacités mentales.
•  Des brimades répétées peuvent transformer les victimes en sales cons.
•  Absentéisme.
•  Rotation du personnel élevée (plus le temps passé au travail à rechercher un autre employé).
•  Les conséquences pour les sales cons
•  Victimes et témoins hésitent à les aider, à coopérer avec eux ou à leur apprendre de mauvaises nouvelles.
•  Représailles de la part des victimes et des témoins.
•  Impossibilité de réaliser tout son potentiel dans l'entreprise.
•  Humiliation lorsque leurs comportements sont dénoncés.
•  Perte d'emploi.
•  Impact négatif durable sur la carrière.

•  Les conséquences pour la direction

•  Temps passé à apaiser, calmer, conseiller ou sanctionner les sales cons.
•  Temps passé à apaiser les collaborateurs victimes d'un sale con.
•  Temps passé à apaiser les clients, fournisseurs, les sous-traitants ou toute personne extérieure importante victime d'un sale con.
•  Temps passé à réorganiser des équipes ou des services pour limiter les dégâts des sales cons.
•  Temps passé à recruter et former les remplaçants après le départ des sales cons ou de leurs victimes.
•  Epuisement des dirigeants qui conduit à une réduction de leur investissement personnel et à une détresse morale accrue.

•  Frais juridiques et de management des RH

•  Séances de thérapie pour la gestion de la colère et autres formations pour rééduquer les sales cons.
•  Coûts des conseils juridiques internes et externes.
•  Coûts des règlements amiables et des litiges remportés par les victimes.
•  Coûts des règlements amiables et des litiges remportés par des sales cons habiles procéduriers (en particulier des procédures pour licenciement abusif).
•  Honoraires des consultants, coach et thérapeutes internes et externes.
•  Coûts d'assurance maladie.


•  Quand les sales cons sont au pouvoir : effets négatifs sur l'entreprise

•  Entraves à l'amélioration dans les systèmes en place.
•  Affaiblissement de l'innovation et de la créativité.
•  Moins de coopération et de cohésion.
•  Moins d'effort « librement consenti ».
•  Perturbations dans la coopération interne.
•  Coût des représailles exercées par les victimes contre l'entreprise.
•  Moins de coopération de la part des entreprises et des acteurs extérieurs.
•  Augmentation des tarifs facturés par les acteurs extérieurs – « prime perçue pour avoir travaillé avec des sales cons ».
•  Difficulté à attirer les meilleurs éléments.

Et pour expliquer que ce coût total de sale con n'est pas que théorique, il donne un exemple de CTSC annuel calculé par une entreprise de la Silicon Valley pour Ethan, un de ses vendeurs les mieux payés, sale con certifié. « Son mauvais caractère est légendaire, il traite tous ses collègues comme ses rivaux, les insulte et les humilie régulièrement, ses emails incendiaires sont aussi redoutés que célèbres et, bien entendu, personne ne veut travailler avec lui. »

Temps passé par le supérieur direct d'Ethan :
250 heures
25 000 $
Temps passé par les gens de la DRH  :
50 heures
5 000 $
Temps passé par les hauts dirigeants :
15 heures
10 000 $
Temps passé par les intervenants extérieurs :
10 heures
5 000 $
Coût du recrutement et de la formation
d'une nouvelle secrétaire :
85 000 $
Heures supplémentaires liées aux exigences
de dernière minute d'Ethan :
25 000 $
Thérapie pour apprendre à se maîtriser : 5 000 $


Coût total estimé du sale con pour un an


160 000$

Même si tous les sales cons ne coûtent pas aussi cher à leurs entreprises, ils coûtent toujours trop cher et il est nécessaire de traiter leur cas.

Quels remèdes ?

Comme le dit crûment une des personnes apportant son témoignage sur le blog des éditions Vuibert (http://objectif-zero-sale-con.blogspot.com/ ) , « le sale con ne se gère pas, il se neut-rat-lise ou il se fuit ».
Robert Sutton n'y va pas, lui non plus, par quatre chemins : il faut se séparer des sales cons certifiés et appliquer l'Objectif zéro-sale-con avec acharnement.
Pour atteindre cet objectif, il préconise 10 mesures ( mes commentaires en italique ).

1.  Annoncer l'Objectif, mettez-le par écrit et appliquez-le. Si vous ne pouvez pas ou ne voulez pas appliquer l'Objectif, mieux vaut ne rien dire du tout, le silence étant moins dommageable qu'une annonce non suivie d'effet. A moins que vous ne vouliez être considéré à la fois comme un hypocrite et comme le patron d'une entreprise envahie par les sales cons.
D'accord pour ne pas afficher l'objectif si vous n'êtes pas sûr d'aller au bout. Par contre, vous pouvez essayer de neutraliser quelques sales cons en ensuite, en cas de réussite, vous pourrez annoncer l'objectif… pour les suivants et là, vous serez crédible. Il vaut mieux ne pas annoncer et faire que d'annoncer et ne pas faire.
2.  Les sales cons embaucheront d'autres sales cons. Ecartez les sales cons du processus de recrutement ou, si ce n'est pas possible, impliquez autant de gens « civilisés » que possible dans les entretiens et les décisions d'embauche pour contrebalancer la prédilection des sales cons à embaucher leurs congénères.
Vous pouvez également faire un premier tri en supprimant systématiquement les candidats choisis par les sales cons…
3. Débarrassez-vous au plus vite des sales cons. En général, les entreprises attendent trop longtemps avant de se débarrasser des sales cons certifiés et incorrigibles, et lorsqu'elles le font, se demandent pourquoi elles ont tant tardé à le faire.
Hélas, après expérience, je ne peux qu'être d'accord. Nous attendons toujours trop longtemps pour virer les sales cons.
4. Traitez les sales cons certifiés comme des employés incompétents. Même s'ils sont extraordinairement brillants dans d'autres domaines, les individus qui se comportent comme des sales cons doivent être traités comme s'ils étaient incompétents.
Complètement d'accord, mais il faut beaucoup de courage pour se séparer d'une personne dont la compétence nous est un besoin vital.
5.  Le pouvoir favorise l'arrogance. N'oubliez jamais que le fait de donner à des individus – même s'ils semblent sympathiques et courtois – une parcelle de pouvoir peut les transformer en super-connards.
C'est parfois vrai, mais pas systématique. Le risque est réel et il est donc nécessaire de bien former vos futurs managers. S'ils deviennent des sales cons, c'est que vous les avez mal sélectionnés ou mal coachés.
6.  Adoptez le « paradoxe pouvoir-performance ». Acceptez le fait que votre entreprise a et doit avoir une hiérarchie, mais faites tout votre possible pour minimiser l'importance et réduire les différences de statut inutiles entre les employés. Il y aura moins de sales cons et, selon les études les plus probantes, la performance sera meilleure.
Sutton a trop tendance à considérer que tout chef est un sale con en puissance et que donc, moins il y aura de chefs, moins il y aura de sales cons. Par expérience, il n'y a ni plus, ni moins de sales cons parmi les managers que parmi les autres catégories de personnes. Cependant, le rôle de manager est difficile. Il faut donc bien sélectionner vos futurs managers, puis bien les former et les coacher au début de leur prise de fonction. Ainsi vous minimiserez les risques qu'ils deviennent des sales cons. Mais vous devrez rester vigilant en permanence, car le virus est très vite attrapé et il vaut mieux l'éradiquer dès les premiers symptômes...
7. Gérez des moments, pas seulement des pratiques, des politiques et des systèmes. Une gestion efficace des sales cons implique de s'attacher à changer de petites choses pour parvenir à une vraie révolution des comportements. Réfléchissez à ce que vous faites, observez les réactions dans vos interactions avec des employés ou dans les interactions entre employés et efforcez-vous « d'améliorer » la relation avec votre interlocuteur direct au moment où elle a lieu.
C'est effectivement dans le quotidien qu'il convient de se corriger et de surveiller d'abord son attitude propre. C'est le meilleur moyen de s'améliorer. Puis, de montrer la bonne voie, car vos collaborateurs calqueront leur attitude sur la vôtre. Si vous êtes « civilisé », ils le seront. Si vous êtes un sale con, ils le deviendront.
8.  Donnez l'exemple de la confrontation constructive et enseignez-la. Développez une culture dans laquelle les individus savent à quel moment ils doivent se battre pour leurs idées et à quel moment il faut cesser la confrontation pour réunir des informations complémentaires, consulter d'autres personnes ou appliquer une décision (même s'ils ne sont pas d'accord). Lorsque le moment de la confrontation est venu, suivez l'avis de Karl Weick : battez-vous comme si vous aviez raison ; écoutez comme si vous aviez tort.
Pourquoi pas ?
9.  Acceptez le sale con symbolique. Sachant que les gens sont plus attentifs aux règles lorsque les comportements répréhensibles sont rares ou occasionnels, l'Objectif zéro-sale-con peut être facile à suivre dans les entreprises qui tolèrent un ou deux sales cons symboliques. Ces « modèles négatifs » rappellent à chacun ce qu'il ne faut pas faire.
Je ne suis pas convaincu par cette 9 ème mesure… Car un sale con reste un sale con et son pouvoir de nuisance reste intact. Tout le monde a suffisamment de sales cons à gérer en dehors de la vie professionnelle pour en supporter un « symbolique » au boulot. Je préfère ne pas avoir de sale con du tout que d'accepter d'en garder un pour que les autres sachent à quoi ça ressemble. Mais faites comme vous le sentez…
10. En fin de compte : liez les grands desseins de l'entreprise et les petites bontés individuelles. La gestion des sales cons devient efficace lorsqu'il existe un cercle vertueux entre les « grandes » actions des entreprises et les petites actions des individus, quand ils se parlent et travaillent ensemble.
Ici, Robert Sutton rejoint Kaplan et Norton dans leur théorie du Balanced Score Card (renvoyer à l'article sur le BSC). Une stratégie a des résultats éclatants lorsque toutes les petites actions de la majorité des individus composant une entreprise tendent à la réalisation de cette stratégie.

Comment éviter soi-même des comportements sale con ?

S'il est important d'éradiquer les sales cons de nos organisations, il est au moins aussi important d'éviter nous-même d'avoir des comportements sale con, même de manière épisodique.

•  Le sale con est contagieux

Il faut tout d'abord éviter les sales cons : éviter de travailler avec eux et limiter les contacts avec eux. Car les sales cons sont contagieux. Il est très étonnant de voir la manière dont une équipe, un service, voire toute entreprise, peut se transformer en « connard-ville ». Il suffit souvent d'un individu, s'il n'est pas neutralisé suffisamment tôt, pour pourrir la situation. Ce seront d'abord les plus enclins à avoir un comportement sale con qui tomberont les premiers et finiront par entraîner le reste. Seuls quelques individus surnageront, mais ce sera un enfer pour ces derniers.
Et si vous êtes vous-même entraîné dans un jeu de sale con, il vous sera difficile d'en sortir. Robert Sutton cite Léonard de Vinci en appui de son propos : « Il est plus difficile de résister au début qu'à la fin ». Ce qui veut dire qu'une fois que vous serez bien contaminé par les sales cons de votre entourage professionnel, il vous sera très difficile de redevenir un être « civilisé ».

•  Considérer ses collègues comme des ennemis ou des rivaux est un jeu dangereux

Ensuite, Robert Sutton explique que « croire que la vie organisationnelle n'est faite que de compétition à outrance est une demi-vérité dangereuse ».
Et il donne quelques « trucs » pour « éviter de devenir un drogué de la compétition ».
•  Avoir un langage favorable à la coopération plutôt qu'à la compétition. Comme le remarquait Peter Drucker, « les plus grands leaders motivants et efficaces pensaient et disaient nous plutôt que je  ».
•  R. Sutton continue : « Enregistrez et écoutez les discussions de quelques réunions : si «  je, moi, moi-même  » prédominent sur «  nous contre eux  », il est peut-être temps de changer de langage : cela vous sera bien utile pour vous aider à tenir en laisse votre côté obscur ».

•  « J'ai ce qu'il me faut »

Sutton donne également ces conseils dignes des meilleurs stoïciens : « Dans votre manière de voir les choses, portez votre attention là où vous n'êtes ni meilleur ni pire que les autres.[…] Réfléchissez à tout ce que vous partagez avec les autres êtres humains, comme le besoin d'amour, de confort, de bonheur et de respect. […] Nous sommes tous pris dans une spirale compétitive, où les gens n'ont jamais assez d'argent, de prestige, de victoires, de gadgets, etc… - et où nous voulons, ou devrions vouloir toujours plus d'avantages que les autres. […] Essayez de vous dire : « J'ai ce qu'il me faut ». 
C'est certainement le point le plus faible du livre. Robert Sutton se transforme en moraliste (même s'il s'en défend dans son blog...), mais ne convaincra que les personnes déjà convaincues... Car quand il y a concurrence pour un poste ou une promotion, tous les moyens deviennent bons et c'est souvent celui qui sera le plus sale con qui gagnera. Les bons sentiments sont souvent mis de côté quand les intérêts entrent en jeu. Et ce n'est pas uniquement dans les entreprises qui mettent la compétition entre individus comme règle suprême. Se dire « j'ai ce qu'il me faut » quand un collègue manifestement moins doué, mais plus sale con, vous prend la place sous le nez reste difficile à accepter. Il y faut une forte dose de vertu. Et ce ne sont pas les arguments de Sutton qui vous soutiendront...
Sutton ne convaincra pas les patrons sans foi ni loi pour qui la recherche de toujours plus de profit sert de morale. Comment les convaincre de poursuivre l'Objectif zéro-sale-con alors qu'ils sont les premiers sales cons de leur entreprise ? Et il y en a plus qu'on ne pense.
Il ne convaincra pas non plus les jeunes loups aux dents longues, prêts à écraser quiconque se trouvera sur le chemin de leur ambition.
Alors, oui, l'objectif zéro sale con est un objectif humaniste, mais qui ne peut être mis en oeuvre que par des individus ayant autorité pour neutraliser les sales cons dans leurs équipes. Même si Sutton explique que ses recherches l'ont conduit au constat que lorsqu'un individu est mis en position de pouvoir par l'organisation il a naturellement tendance à en abuser, ce seront bien les « individus en position de pouvoir » qui seront à l'origine de l'Objectif zéro-sale-con et qui lui donneront l'impulsion nécessaire.

Continuons à étudier les conseils de Robert Sutton… en considérant que nous sommes entre personnes civilisées…

•  « Connais-toi toi-même »

Etre lucide sur soi-même est le début de la sagesse.
Robert Sutton propose un test (pp 112-114) pour dépister si vous êtes un sale con certifié ou occasionnel. Pour faire ce test, allez sur le blog des éditions Vuibert ( http://objectif-zero-sale-con.blogspot.com/ ). Essayez, c'est décapant…
Mais ce qui est important est moins la manière dont vous vous percevez que celle dont les autres vous perçoivent. Si les autres vous considèrent comme un sale con, c'est cela qui importe. Et il y a souvent (toujours...) un écart très important entre la manière dont nous nous percevons et la manière dont les autres nous perçoivent.
Mais qu'il est difficile de savoir réellement ce que les gens pensent de nous ! Et quand on le sait, quelle déception… on se croyait si bien !
On hésite toujours à dire la vérité aux gens et à leur dire ce qu'on pense réellement d'eux. Je reconnais qu'il est difficile de dire ses quatre vérités à son patron, surtout si celui-ci est un véritable sale con. Et dans ce dernier cas, il est préférable de ne rien lui dire…
Par contre, dire ce que l'on pense d'eux à ses collaborateurs est le devoir de tout manager, même si cela n'est pas facile. Les entretiens d'évaluation sont destinés (entre autre) à cela.
Robert Sutton, de son côté, conseille de donner le test de détection de sale con à des personnes de votre entourage que vous connaissez bien (et qui vous connaissent également bien) et qui sont dignes de confiance (elles vous diront la vérité), en remplaçant le « je » par votre prénom. Essayez, c'est un bon moyen de vérifier votre propre évaluation, mais attention au choc…

•  Personnalité, environnement et comportement

Si la personnalité est importante, et si des centaines de traits de caractère peuvent rendre une personne plus susceptible de se comporter comme un sale con, elle n'explique pas tout, car « tout le monde ou presque peut être contaminé par le virus ».
Cependant, Robert Sutton préfère ne pas insister sur la personnalité, car « il est très difficile de changer de personnalité ». Par contre, il est plus facile (relativement…) de prendre des mesures simples comme choisir l'entreprise dans laquelle on travaille (ou au moins celles dans lesquelles nous ne travaillerons jamais), quitter un lieu de travail malsain, éviter les gens malveillants, changer son « cadrage » (sa manière de voir les choses), tester la manière dont les autres nous voient, faire le point sur la manière dont nous avons traité notre interlocuteur lors d'une entretien, etc…

La présentation de l'édition française du livre de Sutton faite par Hervé Laroche est très intéressante à ce sujet et pose bien le problème. Ce dernier affirme que la souffrance au travail a été traitée dans de nombreux articles et qu'il y a deux manières différentes d'expliquer l'origine de cette souffrance.
D'un côté la position de Christophe Dejours qui, dans « Souffrance en France » (Le Seuil, 1998) « traite de l'injustice sociale en général et dénonce avant tout les effets du système économique actuel. […] C'est avant tout la « machine néolibérale » qui fabrique des bourreaux. […] La responsabilité porte davantage sur le système que sur les individus ; et les individus – ordures ou sales cons – n'agissent pas gratuitement, mais pour servir le système. »
A l'opposé, pour Marie-France Hirigoyen (« Le harcèlement moral » La Découverte , 1998), « le harcèlement moral n'est pas l'effet d'un système pervers, mais de personnalités perverses. […] Il est possible que des contextes soient favorables au harcèlement, mais il n'en sont pas la cause. C'est dans l'individu qu'il faut rechercher cette dernière. Le harceleur est donc seul responsable de son comportement. »
Hervé Laroche situe le livre de Sutton à un autre niveau : la définition du sale con ne porte que sur le comportement. Le livre de Sutton présente « une vison très réaliste de l'organisation comme un système social qui engendre des processus psycho-sociologiques dangereux. […] La conclusion des recherches de Sutton c'est que, s'il y a une machine infernale à produire des sales cons, c'est d'abord, tout simplement, l'organisation ordinaire. »
Retenons que certains traits de la personnalité, ainsi que l'environnement (l'organisation) peuvent favoriser ou freiner des comportements sale con. Sutton n'entre pas dans le débat pour définir ce qui est prépondérant et préfère l'action : il est plus efficace de considérer le comportement en lui-même et d'agir sur celui-ci. Il a en grande partie raison.

Comment survivre à « Connard-ville » ?

Hélas, parfois, vous êtes au milieu de sales cons et vous n'avez pas le choix. Vous ne pouvez pas quitter l'entreprise dans laquelle vous êtes. Du moins, pas immédiatement.
Pour ces malheureux, Robert Sutton donne une « trousse de survie » pour cependant arriver à ne pas trop déprimer et à survivre au milieu des sales cons.
C'est le point le plus intéressant et le plus rassurant de son livre : s'il n'est pas possible de changer la nature humaine, au moins il est possible de survivre (même si c'est difficile) dans une ambiance de sales cons.

•  Cessez de culpabiliser 

Si vous avez un chef ou des collègues sales cons, ce n'est pas votre faute, vous n'y pouvez rien. Arrêtez donc de culpabiliser. C'est le premier conseil libérateur.
Mais ce n'est pas facile, car au début, quand on est la cible de sales cons, on pense que c'est de sa faute, qu'on n'est pas assez bien, qu'on ne travaille pas assez, qu'on n'est pas compétent, etc… Toutes les mésaventures racontées par ceux ou celles qui ont subi les agissements des sales cons disent la même chose.
Ensuite, c'est souvent après avoir rencontré une personne qui leur a expliqué la situation que les victimes ont pu passer au-delà de cette culpabilité et réagir.
Si vous en êtes à l'étape de la culpabilisation, allez sans tarder lire le blog des éditions Vuibert consacré au livre ( http://objectif-zero-sale-con.blogspot.com/ ) et lisez les quelques témoignages. Cela ne peut que vous faire du bien. Ensuite, achetez dès que possible le livre de Sutton et étudiez à fond le chapitre cinq, car ce paragraphe n'en est qu'un résumé.

•  Espérez le meilleur en vous attendant au pire

Une fois que vous aurez arrêté de culpabiliser, il vous faudra vous faire une « philosophie de la vie » qui puisse vous blinder.
Quand vous êtes la victime de sales cons, vous pouvez quand même espérer que la situation s'améliore un peu. Vous pourrez ainsi profiter des moindres moments où l'ambiance se détendra. Mais par contre, attendez-vous toujours au pire.
En tenant ces deux bouts, vous ne serez jamais déçu et vous aurez parfois des satisfactions. Mais ce ne sera pas facile.

•  Exposez-vous le moins possible

Evitez les rencontres avec les sales cons. Limitez votre présence aux réunions avec ces sales cons. Préférez les conférences audio ou téléphoniques.
Réservez-vous des lieux où vous pourrez être tranquille. C'est parfois difficile si vous êtes dans le même bureau ou dans un bureau proche. Profitez au moins des moments de pause (cigarettes, repas, etc...) pour aller respirer ailleurs un air moins contaminé et vous retrouver entre personnes « civilisées ».

•  Cultivez l'indifférence et le détachement émotionnel

Ce dernier point est le plus important et c'est celui qui vous permettra de traverser une période difficile entouré de sales cons. Apprenez quand et comment vous en foutre . C'est certainement le meilleur conseil que donne Sutton.

Ces dernières décennies, les gourous du management ont mis en avant l'intérêt d'avoir des employés motivés et impliqués, enthousiastes et fans de leur entreprise. Mais, précise Sutton, « toutes ces belles théories sur la passion, l'engagement et l'identification à une entreprise sont parfaitement valables SI vous avez un travail intéressant et que vous êtes traité avec dignité et respect. Mais c'est une hypocrisie dépourvue de signification pour les millions de personnes qui sont coincées dans des emplois et des entreprises où elles se sentent brimées et humiliées, où leur objectif est de gagner leur vie en protégeant leur santé et leur amour-propre et non de réaliser de grandes choses pour des patrons qui les traitent comme des chiens ».

Si vous travaillez dans une entreprise où manifestement règnent les sales cons, apprenez et cultivez l'indifférence et le détachement émotionnel. « Essayez de ne pas vous impliquer, de ne pas vous laisser perturber par les trous du cul qui vous entourent et pensez aussi souvent que possible à des choses plus agréables » précise Sutton.

Si vous êtes nouveau, ne vous attachez surtout pas sentimentalement à votre entreprise, ni aux personnes la composant.
Si vous êtes dans l'entreprise depuis de nombreuses années et qu'après une longue période « civilisée » où les rapports entre les personnes étaient sains et satisfaisants, vous vous retrouvez d'un seul coup dans un nid de sales cons, ce sera très difficile de vous détacher émotionnellement de votre entreprise. Il est cependant nécessaire que la raison l'emporte sur les sentiments, sinon, vous allez dépérir. Vous devez vous convaincre que cette entreprise n'est pas la vôtre, que vous n'êtes pas « marié » avec elle, et que, quoi que vous fassiez pour elle, elle ne le vous rendra pas... Bref, que le charme est rompu.

Et dans tous les cas, ne vous impliquez plus dans aucune action « bénévole » qui ne fait pas strictement partie de vos tâches ou de votre fonction. Faites votre travail correctement et foutez-vous de ce qui se passe autour de vous. Ne répondez pas aux sarcasmes, ni aux reproches.
Vous risquez d'être viré ? Ce n'est pas sûr, car les sales cons qui profitent de vous tiennent trop à vous conserver. Et puis, si vous l'êtes, il faut vous dire que de toutes manières, vous l'auriez été, tôt ou tard. Et dans ce cas, il vaut mieux que ce soit le plus tôt possible pour vous permettre de rebondir sans être trop atteint. L'essentiel est que vous gardiez votre santé physique et psychologique.

Un « truc » appris lors d'un stage de conduite de réunions peut être bénéfique : la technique de l'édredon. Lorsque vous êtes attaqué verbalement, mettez-vous en position physique de retrait et considérez que vous avez devant vous un édredon dans lequel toutes les vacheries viennent s'écraser. Et à votre grand étonnement, vous verrez qu'il ne se passera rien : les attaques s'arrêteront d'elles-mêmes. C'est très efficace. Alors que si vous répondez, le sale con n'en sera que plus heureux et en remettra. Il se sentira valorisé.
Une deuxième technique apprise lors de ce même stage : la balle de tennis qu'on laisse passer . Une attaque ? On la regarde tranquillement passer sans réagir : on s'en fout. On a fini de jouer, ça ne nous intéresse plus. Au bout d'un temps très court, l'agresseur s'arrête. C'est également très efficace.
Ne pas répondre aux attaques est la première des attitudes face à des sales cons.
La position physique que vous prenez face à des sales cons est très importante. La communication passe beaucoup plus par l'attitude physique que par les mots.
Il faut vraiment montrer avec tout votre corps que vous vous en foutez : en arrière sur votre chaise, les jambes allongées sous la table, les mains posées sur la table ou légèrement croisées sur votre abdomen, avec l'air neutre ou absent, en pensant très fortement « Cause toujours, ce que tu dis ne m'intéresse pas »...

•  Recherchez les petites victoires

Si vous cherchez à remporter une grande victoire face à un sale con, vous risquez de vous paralyser, et n'arriverez à rien. Essayez plutôt de gagner des petites victoires qui vous persuaderont que vous avez encore un peu de pouvoir et que c'est vous qui pouvez décider d'un certain nombre de choses.

Recherchez les points sur lesquels vous êtes indépendant et profitez de cette indépendance. Robert Sutton donne l'exemple du vice-amiral James Stockdale « resté prisonnier des Nord-Vietnamiens de 1965 à 1973. Après sa libération, il s'est découvert un point commun avec d'autres prisonniers qui, comme lui, avaient survécu : « Nous nous sommes aperçus que lorsqu'un individu est enfermé seul dans une cellule dont la porte n'est ouverte qu'une ou deux fois dans la journée pour qu'on lui dépose un bol de soupe, il réalise qu'après une période d'isolement total sans voir le jour, il lui faut introduire une sorte de rituel dans sa vie pour ne pas devenir un animal [...] Pour la plupart d'entre nous, le rituel s'était institué autour de la prière, de la gymnastique et de la communication clandestine ». Stockdale et d'autres prisonniers survécurent en trouvant chaque jour des centaines de minuscules actions qui leur permettaient de regagner un minimum de contrôle sur leur vie. »
La première petite victoire que vous pouvez gagner est de rester calme et de ne pas vous mettre en colère. C'est vous qui avez la maîtrise de vos émotions, et c'est vous qui décidez de répondre ou de ne pas répondre aux attaques. Décider d'arrêter de « jouer » avec des sales cons sera votre première petite victoire.
Une deuxième petite victoire, plus difficile à remporter, est d'expliquer calmement et gentiment aux sales cons qui vous agressent que vous ressentez très mal les agressions que vous subissez (le fait de dire ce que l'on ressent est très fortement conseillé dans la résolution des conflits interpersonnels) et que vous ne méritez pas d'être traité de la sorte. Cette tactique ne réussit pas à tous les coups, mais elle ne pourra pas vous être néfaste.
Une troisième petite victoire personnelle est d'observer le comportement des sales cons (rien ne vous l'interdit) pour détecter leurs points faibles, ce qui pourra vous permettre de préparer une victoire plus importante. Sutton cite l'exemple d'une secrétaire dont le chef se servait allègrement dans sa réserve de petits gâteaux et sucreries. Après qu'elle lui eût fait plusieurs remarques, cette dernière confectionna spécialement à l'attention de ce goujat des bonbons au laxatif... Et lui apprit la « bonne nouvelle » une fois que le sale con eût tout englouti...
Vous trouverez vous-même d'autres petites victoires qui vous permettront de vous convaincre que vous avez encore une marge de manoeuvre.

•  Un exemple intéressant

Pour conclure cette partie, l'exemple du « Chaudron du Diable » donné par Sutton est intéressant à plus d'un titre.
Trois ans après avoir quitté une entreprise où elle avait souffert de la part de sales cons, Ruth, une jeune femme, se retrouve dans « la même hideuse configuration, avec les mêmes connards utilisant les mêmes méthodes minables. Cette fois, Ruth était prévenue et décida de faire face, bien déterminée à ne pas se laisser abattre. Elle mit au point une stratégie qui s'inspirait d'un conseil tiré d'un guide de rafting : « Si vous êtes éjecté du bateau quand vous êtes dans des rapides, ne luttez pas contre le courant, faites confiance à votre gilet de sauvetage et laissez vous flotter sur le dos, les pieds en premier. Dans cette position, si vous êtes précipité sur des rochers vous pouvez amortir le choc avec vos pieds, vous protégez votre tête et vous conservez votre énergie. » Il se trouve que Ruth était tombée à l'eau dans le « Chaudron du Diable », des rapides d'une rivière de Californie. Le conseil du guide avait parfaitement fonctionné : après avoir dévalé les rapides sans se blesser, les pieds en avant, Ruth était arrivée dans des eaux calmes et avait nagé jusqu'au raft qui l'attendait sur une petite plage.
« Ruth se souvint de cette stratégie lorsqu'elle se retrouva dans une autre sorte de chaudron du diable : une réunion – la première d'une longue série - où, avec d'autres collègues, elle fut la cible d'attaques personnelles, de regards méprisants et de critiques cinglantes. Le virus du sale con se répandit comme un feu de brousse et contamina des gens qui étaient généralement aimables et raisonnables. Ruth étendit les jambes sous la table et l'image du rafting lui revint en mémoire. Elle se dit : « D'accord, je viens d'être éjectée du bateau par cette bande de sales cons, mais je sais comment survivre. »
« Au lieu de se considérer comme une victime, Ruth se sentit forte. Elle réalisa que si elle ne cédait pas à la panique et se « laissait flotter avec les pieds en premier », elle se sortirait d'affaire intacte et avec toute son énergie, prête à faire face à ce qui pouvait survenir. »
Sutton tire les leçons de cette expérience : « La stratégie du Chaudron de Satan mise au point par Ruth comprend deux éléments clés pour aider les gens à préserver leur santé physique et mentale – et à faire leur travail - même lorsqu'ils sont encerclés par une meute de sales cons vicieux. Tout d'abord, Ruth apprit à recadrer la méchanceté dont elle était la cible de manière à se détacher émotionnellement des sales cons – voire à être indifférente à leur comportement. Ensuite, elle n'essaya pas de lutter contre des forces supérieures aux siennes, qu'elle ne pouvait pas maîtriser. Au lieu de cela, elle se concentra sur tous les petits moyens de gagner une parcelle de contrôle sur la situation. »

Le « petit chef » et le « sale con »

Quelle est la différence entre un petit chef et un sale con ? Un petit chef peut-il aussi être un sale con ?
Ces questions méritent de s'y attarder quelques instants... mais pas plus...

Les attitudes entre les deux se ressemblent et un petit chef est la plupart du temps un sale con : il cherche à rabaisser ses subordonnés, il s'attaque de préférence aux petits et lèche les bottes de ses supérieurs.
La grande différence vient de la réciproque : un sale con n'est pas forcément un chef ; il n'est nul besoin d'avoir une autorité pour être un sale con certifié.

Ce qu'il faut retenir

Plusieurs critères objectifs permettent de détecter un sale con.
N'importe qui peut devenir un sale con.
Un sale con sévissant dans une entreprise coûte très cher.
Le risque de devenir un sale con est plus important pour ceux qui prennent des responsabilités hiérarchiques. Les conséquences en sont également plus dommageables. Il convient donc de veiller à leur sélection et à leur formation.
Le rôle des chefs « civilisés » est de déclarer la guerre aux sales cons dans leurs équipes afin de poursuivre l'objectif zéro-sale-con.
Pour ceux qui sont contraints (au moins temporairement) de vivre à Connard-ville, il existe une « trousse de survie ».


Pour aller plus loin :

Sur ce site :

•  Le syndrome du petit chef

Livres :

•  Objectif Zéro-sale-con de Robert Sutton aux Editions Vuibert

Sites internet :

•  Blog des éditions Vuibert