Si les trois premiers « S » sont faciles à comprendre, j'ai eu de la difficulté à comprendre la signification de ce 4 ème « S » dans le livre de Takashi Osada. Il n'est pas une étape ni une action, mais une situation. Après avoir relu plusieurs fois le chapitre sur ce 4 ème « S » dans le livre de T. Osada, avoir participé à plusieurs sessions de formation et lu d'autres ouvrages et de nombreux articles sur les « 5S », je pense avoir mieux compris ce concept. J'en ai donné les différentes interprétations dans l'article sur la signification des 5S .
L' objectif de ce 4 ème « S » est de veiller à ce que les moyens qui permettront de maintenir le rangement et la propreté et de garantir qu'aucun objet inutile ne viendra encombrer les postes de travail, soient mis en application.
C'est par le visuel que cet ordre sera le plus simplement assuré. En définissant des standards visuels et en mettant en évidence les anomalies.
Ce qui ne pourra être « réglementé » par le visuel le sera par une procédure écrite, mais uniquement en dernier recours.
Standards
J'ai eu de la réticence envers le concept de « standard » et de « standardisation ». Ces notions se rapprochaient trop dans mon esprit de Taylor et du taylorisme et donc de l'asservissement de l'homme à la machine. En découvrant le livre de Jeffrey Likker « Le modèle Toyota », j'ai compris l'importance de la définition de ces standards, à condition qu'ils soient réalisés avec les opérateurs et acceptés par ces mêmes opérateurs, ce qui est la différence fondamentale d'avec Taylor. A noter qu'Osada ne parle pas des « standards », mais il emploie le mot « règles » qui est à peu près l'équivalent.
Dans les 5S, il s'agit de définir des standards avant tout visuels.
Vous commencerez d'abord par fixer les « normes standards » :
manière de marquer les emplacements en fonction des objets ou produits
manière de faire les étiquettes pour les noms des objets (taille, police, support, etc.)
couleurs des machines, sols, murs, etc. Ceci évitera de se poser la question à chaque opération de remise en peinture. Et chaque couleur peut avoir une signification (par exemple couleur de tuyauteries indiquant le produit qui passe à l'intérieur)
N'oubliez pas de faire participer les opérateurs à la définition de ces standards.
Ensuite, les standards concernant le débarras et le rangement se créeront automatiquement : chaque emplacement matérialisé d'un objet est un standard, car l'objet devra s'y trouver et surtout pas un autre. Et tout objet sans emplacement matérialisé sera au moins suspect.
Les standards concernant la propreté seront plus difficiles à fixer, mais des photos ou des « témoins » des situations correctes pourront servir de standards.
Vous pourrez également rédiger des standards pour expliquer les modes opératoires à suivre dans le cas d'opérations difficiles.
La mise en évidence des anomalies
Les anomalies, dans les 5S, sont des écarts par rapport aux standards définis.
Le meilleur moyen de conserver les progrès réalisés par l'application des trois premiers « S » est de faire en sorte que chaque anomalie soit corrigée immédiatement. Pour cela, il est nécessaire que ces anomalies soient détectées dès qu'elles apparaissent.
Les opérateurs doivent être sensibilisés à cette détection, mais ils ont d'autres tâches et souvent d'autres priorités que de faire la chasse aux anomalies.
Il est donc indispensable que chaque anomalie soit mise en évidence le plus automatiquement possible.
La vue est le sens dominant et celui qui permet de détecter le maximum d'informations sur notre environnement.
Ce sera visuellement que les anomalies seront le plus facilement mises en évidence. C'est pour cela qu'il est nécessaire de définir des standards visuels.
D'où le management visuel.
Le management visuel
Définition du management visuel
Le management visuel est la manière de gérer une activité par la vue : tout ce qui se passe dans une entité se voit immédiatement et surtout, la moindre anomalie est visible immédiatement.
Le management visuel s'applique parfaitement aux 5S, mais il peut également être appliqué dans de nombreux autres domaines. Par le management visuel vous pouvez d'un seul coup d'oil savoir ce qui se passe dans un atelier, dans un bureau, sur un poste particulier. Le management visuel permet également de comprendre facilement ce qu'il y a à faire sur un poste de travail. La formation peut facilement être faite à partir du visuel.
On l'appellera alors « l'usine visuelle ».
Mais ici, nous ne traiterons que du management visuel appliqué aux 5S.
Principes du management visuel
T. Osada donne 4 principes :
Détermination des points importants qu'il faut gérer : matériels, machines, zones, lieux, activités qui doivent être mis sous contrôle. Ce sont ces points sur lesquels vous appliquerez le management visuel.
Anomalies à détecter : pour ces points importants, vous allez déterminer les anomalies qui devront être repérées. Pour vous aider, vous pouvez examiner les règles (et/ou standards) qui doivent être appliqués : le non respect constitue une anomalie.
Repérage des anomalies : vous allez ensuite déterminer les moyens de repérer facilement ces anomalies. L'équipe devra faire preuve d'imagination, car dans certains cas, c'est difficile.
Correction des anomalies à court terme et à long terme : en cas d'anomalie, il faudra prévoir par avance la correction à apporter. Et lorsque ces anomalies le nécessiteront, il faudra prévoir la suppression définitive des causes de ces anomalies.
Exemples
Pour le débarras, l'anomalie sera l'apparition de matériels ou d'objets inutiles sur les postes de travail, dans les ateliers ou dans les magasins.
Sur les postes de travail et dans les ateliers, chaque matériel ou objet a une place matérialisée, et le nombre est également déterminé : tout objet en trop se verra immédiatement.
Dans les magasins, où il est très facile d'avoir des matières premières ou des pièces détachées en trop (au cas où.), les anomalies peuvent être fréquentes. Le meilleur moyen de les détecter sera d'avoir juste la place pour le stock maximum de matières ou de pièces dans des emplacements réservés. Dans le cas d'un surplus, il sera mis ailleurs et sera vu immédiatement. Si on ne peut limiter la place du stock maxi, il sera toujours utile d'inscrire le stock maxi sur l'emplacement. La détection de l'anomalie sera moins facile, mais avec de l'attention, elle pourra être détectée. Pour les matières ou pièces qui peuvent être mises dans n'importe quel emplacement, l'anomalie pourra être révélée par un niveau mini maxi sur un listing informatique.
Pour le rangement, l'application du management visuel est assez simple et nous l'avons vu dans l'article traitant du rangement : chaque chose a une place et chaque chose doit être à sa place.
Tout matériel doit donc être rangé à l'emplacement prévu.
Pour le cas de matériels à disposition d'un ensemble d'opérateurs (outillage, matériel de contrôle, etc.), si une personne a emprunté un objet, on doit savoir qui a emprunté l'objet et quand cet objet sera de retour. Voici quelques idées pour régler ce délicat problème :
Vous mettez à disposition des emprunteurs potentiels des fiches pré imprimées (format ¼ de page A4) sur lesquelles ils inscrivent leur nom et la date de retour prévue. Ils mettent cette fiche à l'emplacement du matériel emprunté. Ils jettent cette fiche une fois le matériel remis en place.
Vous pouvez également mettre sur chaque emplacement un petit tableau effaçable sur lequel la personne qui a emprunté l'objet mettra son nom et la date du retour. Cette personne effacera les informations au retour de l'objet. Mais cette solution nécessite de nombreux tableaux effaçables. Cela peut être une solution dans certains magasins avec des grosses pièces.
Vous pouvez attribuer des ardoises effaçables aux emprunteurs sur lesquels ils marquent leur nom et la date de retour ; ils récupèrent leur ardoise au retour du matériel.
Vous pouvez attribuer des badges ou macarons nominatifs sur lesquels il suffira que les emprunteurs indiquent la date de retour (comme pour les consignations sécurité de matériels). Ils récupèrent ce badge ou macaron au retour de l'objet.
L'anomalie sera l'absence du matériel sans l'identité de l'emprunteur ou sans la date de retour.
Pour le nettoyage, ce sera plus difficile. Il faudra d'abord déterminer les matériels et lieux dont la propreté sera importante. Ensuite, il faudra déterminer le niveau de propreté adéquat et définir des standards, comme cela a été vu dans la partie concernant le nettoyage. L'anomalie sera lorsque le niveau de propreté ne sera plus conforme au standard, en particulier les salissures qui peuvent survenir : fuites, écoulement, débordement, poussière, traces, etc.
Ces anomalies seront visibles si le matériel est parfaitement propre et si sa couleur est claire. Il est donc important de bien choisir les couleurs des matériels.
Si une fuite ou un écoulement peuvent être facilement détectés, le niveau d'empoussièrement est plus difficile à évaluer, car cette poussière se dépose petit à petit et déterminer le niveau acceptable de celui qui ne l'est plus n'est pas aisé. Une croix ou un carré de faible dimension d'une couleur proche de la couleur du matériel permettra de déterminer ce moment quand le croix ou le carré ne se distinguent plus.
Mise en peinture
Une fois que vous aurez commencé à nettoyer vos ateliers et quelques postes de travail, vous allez avoir envie très vite de repeindre ces ateliers et ces machines.
C'est important, mais ne le faites pas n'importe comment.
Commencez par définir les couleurs que vous allez utiliser :
Murs et plafonds : le blanc est ce qui permet de mieux repérer les anomalies ; vous pouvez choisir d'autres couleurs, pourvu qu'elles soient claires. Evitez les couleurs vives.
Sol : les sols sont souvent peints dans les ateliers. Il existe peu de couleurs pour les sols : privilégiez le gris qui est le plus clair. Le rouge ou le vert vous permettront plus difficilement de détecter les anomalies.
Portes et fenêtres : vous pouvez les peindre de la même couleur que celle des murs ou vous prenez une autre couleur vive pour « casser » la monotonie de la couleur claire. Evitez le gris qui est trop triste.
Couleurs réglementaires : les couleurs des canalisations doivent respecter les couleurs conventionnelles . Le jaune clair est réservé aux protections (rambardes, etc..) et le rouge à la sécurité.
Manutentions : si vous avez des matériels de manutention adaptés à certains produits (transporteurs, conteneurs, caisses, etc), vous pouvez affecter des couleurs en fonction du produit qui est transporté : matières premières, en-cours, produits finis. Cela vous permettra de reconnaître d'un coup d'oil où vous en êtes dans l'atelier.
Matériels : n'hésitez pas à mettre des couleurs vives et brillantes. Vous pouvez définir des couleurs par secteur de fabrication, par type de matériel (tours, fraiseuses, soudeuses, etc.). Vous pouvez aussi laisser l'initiative des couleurs aux opérateurs, mais « cadrez-les », sinon, vous risquez d'avoir des surprises.
Harmonie des couleurs : veillez à ce que les couleurs que vous aurez choisies restent en harmonie , sinon, l'effet ne sera pas très professionnel. Surtout si vous avez laissé l'initiative complète à vos opérateurs.
Faites repeindre par les opérateurs eux-mêmes, même si ce ne sont pas des professionnels de la peinture (quoi que certains sont certainement de très bon bricoleurs), ils seront fiers de ce qu'ils auront fait et prendront soin de leurs matériels.
Règles écrites
Tout ne peut pas être décrit, ni édicté sous forme visuelle.
Ainsi, le panneau qu'on trouvait dans nos campagnes « Défense de déposer des ordures » est inutile lorsque vous avez commencé une opération 5S dans votre société, car le seul fait d'attribuer un emplacement à chaque objet ou matériel (y compris les déchets) fera mettre en évidence le non respect de cette règle de base.
Par contre, expliquer comment nettoyer une machine nécessitera au moins un plan de nettoyage (Cf. la page sur le nettoyage ) dans les cas les plus simples et un mode opératoire (standard) pour les cas plus compliqués.
Ces règles écrites seront rédigées par les opérateurs. S'ils ont de la difficulté à rédiger, ce pourra être fait par le chef d'équipe, ou tout autre rédacteur (technicien qualité ou méthodes), mais en partant toujours des avis des opérateurs qui devront valider le mode opératoire au final. Les techniciens des méthodes et / ou qualité aideront à trouver les bonnes solutions, mais sans se substituer aux opérateurs. Le chef de service devra aussi valider le mode opératoire, mais en prenant plus de hauteur : il doit s'assurer que ce mode opératoire ne va pas à l'encontre de la stratégie ni de l'intérêt du service. Par exemple, si les opérateurs préconisent de mettre 2 personnes pour une opération de nettoyage alors qu'une seule est largement suffisante, il ne devra pas accepter, et expliquer aux opérateurs le pourquoi de son refus.
Ce qu'il faut retenir
L'ordre est le 4 ème S.
L'objectif est de maintenir l'état ordonné des ateliers et machines une fois les trois premiers S réalisés.
Standardisez les situations de manière visuelle.
La détection des anomalies par le management visuel permettra de maintenir cet ordre.
Pour la mise en peinture, veillez à l'harmonie des couleurs.
Certaines règles ou standards devront être mis par écrit.
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Sur ce site :
L'origine des 5S
La théorie des 5S :
Seiri
Seiton
Seiso
Seiketsu
Shitsuke
Livres :
« Les 5S » de Takashi Osada chez Dunod
« Guide pratique des 5S pour les managers et encadrants » de C. Ohmann aux Editions d'organisation
Sites internet :
Couleurs conventionnelles des tuyauteries rigides en fonction des fluides :
Normes NF X 08-100 et suivantes.
Harmonie des couleurs
Sites donnant des conseils pour l'harmonie des couleurs :
Les deux sites suivants sont orientés « sites web », mais l'harmonie est la même dans un atelier, un bureau ou sur internet :
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